Le Hashing est une combinaison d’athlétisme et de relationnel, d’hédonisme et d’effort physique; une manière aussi de casser la routine du labeur professionnel. C’est un mélange euphorisant de course à pied, d’exercice d’orientation et un excellent prétexte à faire la fête sans se ruiner.
“Le Hashing est l’état d’esprit propre à une grande fratrie qui se réunit dans le seul but de revivre les jours heureux de l’enfance et de se libérer du quotidien en se lâchant complètement avec d’autres nostalgiques souffrant du même sens de l’humour.” (Définition donnée par Stray Dog -?Chien Errant?- et tirée du chapitre des Grandes Divagations de la Bible des Hash House Harriers)
Des meutes de harriers et de harriettes s’élancent sur des circuits de 8 à 10 km à travers la ville, la campagne, la montagne, les plages ou le désert (et jusqu’en Antarctique !), tous à la recherche de défoulement à l’air libre, de bonne camaraderie et de fous rires garantis. L’organisation des Hash House Harriers est complètement décentralisée, avec des sections (aussi communément appelées «?kennels?», chenils) qui peuvent se former et se dissoudre n’importe quand. Tout le monde est bienvenu, il suffit de se présenter. En Thaïlande, selon les clubs, les cotisations vont de 50 à 300 bahts par personne et par course. Le budget est complété par les sponsors (sans qui rien ne serait possible, faut-il le répéter). Précisons que la grande majorité des participants sont des anglophones, mais les francophones commencent à s’y mettre.
AVERTISSEMENT : peut importe que vous soyez en forme ou passablement rouillés, sachez simplement que le Hash est d’abord et avant tout un club extrêmement convivial. Vous n’êtres pas tenus de courir durant tout le parcours, vous pouvez simplement marcher à votre rythme ou alterner. Il y a même des fidèles qui ne courent jamais, ils viennent juste pour s’aérer et passer une bonne journée entre amis.
HISTORIQUE : Le Hashing, tel qu’on le connaît aujourd’hui, est né en 1938 à Kuala Lumpur, dans ce qui était encore les États Malais Fédérés, lorsqu’un groupe d’expatriés britanniques inventèrent un sport pour joyeux drilles azimutés. Les folles randonnées des Hash House Harriers furent calquées sur les jeux de piste des vieilles écoles anglaises, remontant au 19ème siècle (pour la toute première, on parle de la Rugby School, Warwickshire, en 1837). Selon la tradition, un pisteur (le lièvre) part le premier pour baliser la voie, laissant ici et là des serpentins de papier blanc indiquant l’itinéraire à suivre, pour être aussitôt poursuivi par une horde de dératés hilares et vociférants. Seul l’éclaireur sait où il va. Ses traqueurs suivent ses traces pour garder le cap. Outre l’excitation de chasser un lièvre à l’intelligence sauvage et débridée, résoudre l’énigme des indices et franchir la ligne d’arrivée sont des récompenses non négligeables, sans compter que, au bout du chemin, les soiffards trouvent de la bière glacée à volonté…
Le Hashing connut un passage à vide pendant la Seconde guerre mondiale, lorsque les Japonais (pas très égrillards) occupèrent la péninsule de 1942 à 1945, mais reprit de plus belle dès 1946, se popularisant ensuite à Singapour, en Australie et en Nouvelle-Zélande, puis explosant littéralement partout ailleurs, à la charnière des années 70-80. Il y a aujourd’hui des milliers de clubs de Hash House Harriers dans au moins 184 pays (dont plusieurs centaines rien qu’aux USA), avec leurs bulletins de liaison, leurs répertoires de membres et leurs assemblées locales et internationales. Depuis quelques années, ils se multiplient de façon exponentielle grâce à l’Internet. On compte désormais plus de 150?000 hashers dans le monde.
Malgré sa prolifération, le Hashing ne s’est pas trop éloigné de ses racines britannico-malaisiennes. De nos jours, une course de Hash (un “run” comme disent les… francophones) est un groupe hétéroclite de 40 à 60 personnes, hommes et femmes, qui se rencontrent au moins une fois par semaine. Chaque fois différents, les itinéraires sont fléchés et on ne s’ennuie jamais en les parcourant.
Voici ce qu’en disent les mordus purs et durs : «?En cas de force majeure, il peut nous arriver de dévaler des rues ou des allées, mais en général on préfère de beaucoup la campagne, les champs, les forêts profondes, la jungle inextricable, les obstacles infranchissables, les marais bourbeux, les torrents impétueux, les chutes d’eau spectaculaires et les falaises abruptes?».
Même si certains coureurs abstinents dédaignent la bonne bière fraîche au profit de l’eau plate ou du coca-light, à l’arrivée c’est toujours la fête. C’est peut-être pour ça qu’on les appelle “les buveurs atteints de folie galopante?”.
Une des particularités des Harriers est l’autodérision : pour preuve, les surnoms ridicules dont ils s’affublent, à commencer par les organisateurs qui s’autoproclament “Mis-Management” (mauvaise gestion) ou “Dis-Organisation”. Définition du Grand-Master : un membre de ces idiots prétentieux qui font partie du Hash Mismanagement. Le médecin (volontaire) de service est désigné comme “Quack” (charlatan) et les vétérans ne font pas dans la poésie puisqu’on trouve par exemple “Festering Streaker” (coureur nu faisandé), “Timmy Tight Pants” (Timmy au slip moulant), “Big Nosed Bastard” (Le salaud avec un gros nez), “Ringworm” (herpès), “Rabid Bitch” (chienne enragée) ou “Pussy Virus” (sans commentaires). Même les meilleurs coureurs n’échappent pas à l’humour caustique et sont étiquetés “FRB, Front Running Bastards” (les salauds qui courent en tête). Les tricheurs ne sont pas bien sûr épargnés : “SCB, Short Cutting Bastards” (les salauds qui prennent des raccourcis)…
La devise du «?Bangkok Friday Thinking Drinking Hash House Harriers?» n’a rien de très cartésien??: Cogito Ergo Imbibo (je pense donc je m’imbibe) !
Deux ou trois hashers, appelés hares (lièvres), choisissent un itinéraire qu’ils balisent (de blanc) à la craie, à la farine ou avec des lambeaux de papiers. Ils peuvent le faire soit quelques heures avant la course, ou bien juste un quart d’heure avant le départ. Pour relever la sauce, ils indiquent aussi de fausses pistes qui forcent les poursuivants à revenir sur leurs pas. Même les plus entraînés se font avoir et ne finissent pas forcément plus tôt que les néophytes. Tout au long du chemin, la solidarité est de mise pour ne perdre aucun coureur en route et l’un des baliseurs ferme la marche pour s’en assurer. Le degré de difficulté est variable, le “bush” restant le plus dur des parcours.
Lorsque la course est terminée, les hashers se réunissent au camp de base pour engloutir quelques canettes et participer au rituel incontournable du Cercle, généralement présidé par le Grand-Master ou par des membres du comité organisateur. C’est le moment d’infliger des punitions pour des fautes la plupart du temps totalement inventées par les confrères. Tous les prétextes sont bons pour faire asseoir sur de gros pains de glace (au milieu du Cercle) les bienheureux coupables, et cul nu s’il vous plaît ! Mais bien sûr sans aucun exhibitionnisme (la loi du pays et la dignité des personnes sont respectées).
Chaque condamné est tenu de boire un gobelet de bière (ou autre) pendant qu’il se rafraîchit le fondement. Il est des nôtres, il a bu son verre comme les autres ! Il faut tout avaler ou bien se verser le reste du contenu sur la tête. Les nouveaux (…?baptisés “virgins” ou pieds-tendres) sont souvent initiés de cette manière. La peine capitale pour les lièvres-baliseurs qui ont abusé de fausses indications consiste à trôner plusieurs longues minutes sur un grand seau rempli de glaçons, parfois avec une lunette de w.c. autour du cou. Les maîtres de cérémonie se relaient pour porter les accusations et amener les supposés fautifs à subir leur peine. Naturellement, tout finit par des chansons de salle de garde. Le Cercle peut durer de quelques dizaines de minutes à plusieurs heures, selon la ferveur des inquisiteurs et la réserve de bière. Il n’y a pas de règles (sauf celle de ne pas porter des chaussures neuves !) mais les traditions diffèrent d’un club à l’autre.
Lorsque la boucle est bouclée et le Cercle clôturé, il est d’usage pour les participants de se retrouver dans un restaurant, un pub ou même un bar A-gogo pour partager un buffet organisé par les méchants membres. Encore un excellent prétexte pour “sociabiliser” et se désaltérer plus avant. Le compte-rendu de chaque course (malicieusement rédigé par le scribe de permanence) est publié dans les journaux locaux et les sites internet spécialisés.
Les premiers clubs de Hash House Harriers ont été fondés au tout début des années 1980 à Bangkok, Chiangmai et Songkhla. L’épidémie de course folle s’est ensuite propagée à Pattaya, Phuket, Hua Hin, Koh Samui, Udon, HatYai et même jusqu’à Vientiane, au Laos, certaines villes comptant plusieurs clubs, chacun avec ses spécificités (entre autres, pour la fréquence et les jours de la semaine ainsi que les différents types de parcours?: praticable, jungle et bush).
Depuis 1978, les années au nombre pair, dans la zone Asie-Pacifique et au-delà, se tiennent des courses “InterHash“ qui mobilisent de plus en plus de fadas venus du monde entier. Ces événements reçoivent l’aide des communautés locales et des sponsors. Rappelons que les organisateurs sont tous bénévoles et les bénéfices sont reversés à des œuvres caritatives. Le premier Interhash sur le sol thaïlandais a eu lieu à Pattaya en 1986 et le deuxième à Phuket en 1992 (avec le soutien du ministère du Tourisme). Celui de 2006 s’est déroulé fin octobre à Chiangmai.
Des courses “InterHash“ au niveau régional sont programmées en alternance durant les années au nombre impair, par exemple le PanAsia Hash, l’EuroHash et l’InterAmericas Hash. Il y a aussi les “Nash“ (National Hash) dont le premier s’est tenu en Nouvelle-Zélande en 1977, idée tout de suite adoptée par l’Australie. Depuis, les Nash sont devenus des rendez-vous bisannuels incontournables, non seulement en Australie et en Nouvelle-Zélande, mais aussi au Royaume-Uni, en Allemagne, en Suisse, aux États-Unis, et d’autres pays sont demandeurs, car ce phénomène est en pleine expansion. Bref, si vous voulez agrémenter vos sorties pédestres avec de la franche rigolade, de la bonne compagnie, de nouveaux horizons et un défi sportif hors du commun, essayez le Hashing !
Les hashers française de Phuket, y compris les Belges, parce que c'est vraiment seulement un peu de Nord de la France
Que ce soit bien clair, “Hash“ ne fait aucunement référence au cannabis ou à la marie-jeanne. Hash vient tout simplement du mot français hachis (aux relents de brouet) et hash house se traduit donc par gargote. Pour ce qui nous occupe, “Hash House“ était le surnom affectueusement donné au Royal Selangor Club de Kuala Lumpur (à cause de sa cuisine insipide) par les fonctionnaires et les hommes d’affaires britanniques qui logeaient et dînaient là pendant l’entre-deux-guerres. On voit bien que ce nom n’a absolument rien à voir avec ce qu’il désigne aujourd’hui. Cela tient d’une facétie de l’un des fondateurs du mouvement, Albert Stephen Gispert (1903-1942), un Anglais d’origine catalane : lorsqu’arriva le jour d’enregistrer légalement cette association, c’est le titre qu’il donna à l’officier d'état civil. Hashing et Hasher sont formés sur le mot original détourné et n’ont donc plus aucun rapport avec la tambouille. Quant à Harrier, cela veut simplement dire ‘coureur de cross’.
Voici d’ailleurs quels étaient les objectifs déclarés des Hash House Harriers, d’après la fiche signalétique du club originel qui se réunissait le lundi :
Article paru dans Le Paris Phuket 18 Texte de Raymond Vergé
Merci à Le Paris Phuket et Caroline LALETA BALLINI qui a fourni le texte publié dans le mensuel.
Mrs Caroline Laleta-Ballini & L'Equipe du Paris Phuket 4/13 Moo 10 Soi Bangrae, Chaofa Tawantok Road T. Chalong, Phuket 83130, Thailand Tel: +66(0)869 50 49 61